• Chapitre 1

    le garçon dans les bois

     

    10 ans et je suis déjà fatiguée de la vie. Pourquoi a t-il fallu qu'ils m'abandonnent ici ?

    -Jeanne, va t'aérer ma petite, tu as besoin de prendre des couleurs, autrement mes amies vont penser que je t'enferme. Ah ! Et prend un panier et va me ramasser des fraises. Sa évitera que tu ais les bras croisés.

    -entendue.

    Je ne suis vivante que pour faire la vaisselle, et faire passer la colère de Mme Duchamps, me suis je toujours dite. Posant mes verres à moitiés essuyés, je sortis en soulevant ma robe pour ne pas la salir. Madame est très stricte et déteste les vêtements sales. Slalomant entre les bosquets de roses en fleurs, j'évite les flaques de boue de la veille. Je pris le petit panier en osier posé sur le rebord du muret et m'enfonçai dans les bois. L'air est frais et me donne des couleurs. Un petit buisson apparut à ma droite, brillant de rouge. Des fraises ! Je pris mon ruban qui m'attachait mes cheveux bruns et long et remontai le bas de ma robe. Tant de froufrou n'a jamais été très pratique, mais Madame les préfère, ça donne un petit air riche dit-Elle. Ma cueillette fut longue mais le résultat fut très satisfaisant. Peut-être va-t-Elle m'épargner ce soir, qui sait ? Ne voulant pas rentrer maintenant, je continuai ma marche. Soudain des craquements de branches se firent entendre et une masse tomba de l'arbre en face de moi. Sursautant, je fis un pas en arrière et vis un garçon un peu plus vieux que moi, les fesses dans un roncier. Des cheveux en batailles, des vêtements sales, des égratignures, tout ce qu'Elle n'aimait pas. Il se frotta le postérieur apparemment douloureux, me regarda, les yeux pétillants et me sauta dans les bras.

    -une personne ! Cria t-il.

    Je le repoussai autant que je pus et le fixai. Je n'avais encore jamais vu quelqu'un ayant presque le même âge que moi et un garçon qui plus est.

    -tu ferais mieux de rentrer chez toi, murmurai-je, Madame ne va pas apprécier.

    -j'aimerais bien, vois-tu, mais je n'ai aucune idée de par où je suis arrivé,ricana-t-il.

    -parle moins fort, Elle risque de t'entendre.

    -qui ça ?

    -Madame ma mère.

    Il pouffa.

    -tu es toujours aussi cérémonieuse avec tes parents ?

    -mais ce n'est pas ma mère.

    -et bien alors pourquoi l'appelles-tu comme ça ?

    -parce que si je la nomme mère ou madame, elle me frappe. Donc je fais un mixe. Elle n'a rien contre ,pour le moment, ajoutais-je en me penchant vers un petit buisson rouge.

    Il fronça les sourcils.

    -elle te frappe ?

    -oui, regarde.

    Je lui montrai mon bras couvert d’hématomes.

    -j'avoue que la première fois, c'est assez douloureux, mais je m'y suis faite à force, continuai-je, c'est pour cela que tu devrais rentrer chez toi. Je ne veux pas qu'il t'arrive la même chose.

    -c'est gentil, me sourit-il en me tapotant la tête.

    Mon premier réflexe fut de me couvrir le visage avec mes mains, mais je ne sentis rien. Mes yeux s'écarquillèrent. J'ai pensé qu'il allait me frapper à l'instant mais non. C'est à la fois doux et rassurant.

    -encore, dis-je après qu'il ait arrêté.

    Il me caressa la chevelure, un sourire bienveillant aux lèvres.

    -ma mère me fait souvent ça, quand je ne suis pas bien.

    -elle te frappe aussi ta mère ?

    -non, bien sur que non ! Rigola-t-il, elle est toujours très gentille avec moi et très attentionnée. Elle fait de son mieux pour m'élever, et ne me laisse jamais seul.

    Les yeux écarquillés, j'étais à la fois émerveillée de cette rencontre que terrifiée, mais bien que je connaissais se qui allait arriver si il restait là, je ne pouvais le lâcher des yeux, un être de l’extérieur, tellement intéressant me disais-je.

    -pourquoi tu es là alors ?

    -j'avais voulu me baigner dans la rivière, près du lieu ou l'on pique-niquait, et je suis tombé dedans. Le courant était assez fort, je n'ai donc pas pu remonter avant un bout de temps.

    -pique-niquait ?

    -oui, tu sais, lorsque toute ta famille et toi vous allez dans un endroit paisible et vous manger ensemble.

    -je n'ai jamais fait de pique-nique.

    -tu es une bien triste petite fille dis-moi.

    -je ne suis pas petite ! J'ai 10 ans aujourd'hui !

    -c'est ton anniversaire ?

    -oui, rougis-je en baissant la tête.

    -bon anniversaire alors, que cette année soit magique pour toi, dit-il en s'accroupissant et en me baisant la main.

    -Et bien, et bien ! On dirait que le courant passe bien entre vous !

    Nous nous sommes retournés en même temps. Oh non. Pas Elle.

    -je ne te voyais plus revenir et me faisait du soucis, tu sais, susurra t-elle à mon oreille.

    -En-Enchanté madame, s'inclina mon ami.

    -qu'il est polit se garçon ! Et mignon en plus ! que dirais-tu d'un frère pareil comme cadeau d'anniversaire, ma chérie ? Sourit Madame en tournant autour de lui en lui prenant une mèche, par contre, il va falloir lui faire faire un brin de toilette. Regarde comme il est sale !

    -je ne vous permets pas !

    -ooh ! Il se rebelle ?

    -non ! Laissez le, je vous en pris, il a une famille ! l'implorais-je en m'interposant entre lui et elle.

    Elle m'observa de ces grands yeux noirs avant de devenir rouge écarlate.

    -comment te comportes-tu ?! Je ne t'ai pas élevé ainsi ! hurla t-elle et me poussant violemment contre un arbre.

    Le souffle coupé, je n'en bougeai plus. Elle se rapprocha pour m'en donner encore quand il se posta devant elle.

    -vous n'allez pas bien ?! Frapper votre fille !

    - « kof,kof » pars...dépêche-toi...va rejoindre ta gentille mère...chuchotais-je entre deux toux.

    -pas question ! Je en te laisserais pas ici !

    -regarde ce que tu as trouvé, chérie, un petit prince courageux. Tu en as de la chance. Malheureusement, lui et son héroïsme à deux balles vont finir dans la cave ! Cria-t-elle en nous soulevant par le col.

    Se débattant, il s'époumona contre Madame. Moi, je ne bougeai pas. Perchée à un mètre du sol, acceptant mon sort, pas un mot ne sortit de ma bouche. Finalement elle ne mit pas que mon ami, mais aussi moi. Elle l'accrocha à des chaînes scellées dans le mur et moi, elle me jeta au fond comme une vulgaire serpillière. Attrapant son pied, je la suppliai de me laisser sortir. Elle me donna un coup de talon au visage et sortit en fermant à clé. M’excusant à plein poumon pour qu'Elle entende, je pleurais à chaudes larmes. Je pleurai parce que je ne supportai pas être enfermée depuis toute petite, je pleurai pour toute ces choses qui m’ont fait mal durant cette année, je pleurai pour me rassurer que je suis toujours vivante. Ayant repris son calme, le garçon me fit signe de me rapprocher et me serra dans ses bras. Sanglotant, je m'agrippai à lui de toute mes forces.

    -la, la, me me murmurait-il en me caressant la tête comme avant.


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