• Ploc, ploc, ploc.

    1, 2, 3…

    La pluie gouttait le long de mon parapluie et tombait devant moi, un jeune homme d’une vingtaine d’année qui détestait le mauvais temps et qui n’arrive pas à dresser ses cheveux bruns (sans parler du fait qu’avec l’humidité…C’était mission impossible). Je comptais ces gouttes.  Un cycle que je ne pouvais arrêter, juste observer, subir. Une de ces gouttes glissa méchamment dans mon col, ce qui me fit réprimer un grognement mécontent et un frisson, rentrant ainsi ma tête dans mes épaules, comme si ça allait arranger quelque chose. Un temps pluvieux, un vent glacial digne d’une fin de novembre, bref, cette journée m’agaçait déjà.

    Sur la rue principale de cette ville, je partais en direction du centre commercial à la rencontre de mes amis qui m’attendaient là bas. Et tout en me dirigeant vers le point de rendez-vous, je comptais les gouttes. Ce jour là, il y avait du monde, les gens se bousculaient,  souvent sans s’excuser. Certains étaient pressés, d’autres faisaient tout simplement du lèche vitrine, et moi, j’analysais tantôt leurs comportements, évitant entre deux réflexions un passant quelque peu brutal qui force le passage. La ville était en constante animation, lorsque les gens n’étaient plus cette animation, la pluie prenait le relai, et ainsi je comptais les gouttes en ignorant ces personnes qui n’avaient plus aucun intérêt pour moi. C’est ainsi que j’avais commencé à fixer cette pluie qui perlaient le long du squelette métallique de mon parapluie.

    Ploc, ploc, ploc. loc3g 

    35, 36, 37… ?

    Une agitation à quelques mètres éveilla ma curiosité. Je relevais la tête de mon écharpe et laissais mon regard trouver d’où venait ce bruit. Les principaux responsables de ce brouhaha avaient créés une sorte de bulle protectrice dans la foule. Enfin, disons plutôt que les gens les évitaient et leur avaient réservé un espace d’un mètre de peur de recevoir un coup qui risquait de ne pas tarder à fuser. Du coin de l’œil, j’essayais de comprendre ce qu’il se passait.  Une mère et sa petite fille de 10 ans se disputaient pour je ne sais quelle raison. L’adulte, un regard fatigué, quelques rides, les lèvres pincées et une silhouette mince et quelque peu courbée et sa fille, les yeux qui lançaient des éclairs, un zozotement qui pourrait être adorable s’il n’était pas employé pour cracher des réprimandes, haute comme trois pommes, des cheveux blonds comme l’orge, les deux ne s’étaient apparemment pas tout dit et la petite n’hésitait pas à rattraper ce retard dans la rue. Cette gamine, rouge comme une écrevisse, ne mâchait pas ses mots et alors que je voyais très bien en regardant la lèvre pincée de la femme face à elle qu’elle avait honte, l’enfant reçu sans pitié une soufflée.  Elle se tint la joue, fixa la coupable avec un regard interloqué et s’enfuit à travers la foule. La mère ne réalisa que trop tard sa conduite un peu trop excessive et la disparition de sa fille. Elle avait beau l’appeler, paniquer, sangloter, elle ne revenait pas, comme engloutie dans les profondeurs de cette mer d’humains. Elle arrêtait certaines personnes en leur demandant si elles n’avaient pas vu la petite, s’impatientait, stressait, mais c’était avant de me voir regarder dans sa direction. Elle savait que j’avais vu à l’instant même où nos regards c’étaient croisés. Instinctivement, je baissais les yeux et repris mon chemin d’un pas rigoureux.  Je n’étais qu’un spectateur parmi tant d’autres, je ne connaissais pas l’histoire et n’allais certainement pas rentrer dans cette affaire pour me sentir coupable ensuite. En quelques enjambées, je l’avais déjà semé. Devant moi, désormais, le centre commercial.

    Quel  bonheur, me direz vous, que de devoir aller chercher à l’étage supérieur  du centre commercial les cafés de mes amis suite au tirage malencontreux de la paille la plus courte. Je n’avais jamais vraiment eu de chance aux jeux de hasard, alors lorsqu’on tirait au sort pour savoir qui paierait la tournée de tout le monde, forcément, ça devait tomber sur moi. Je soupirais. Avec ce temps, comment ma bonne étoile pouvait-elle ne serait-ce que montrer le bout de son nez ? Impossible. Tout en marmonnant comme un petit vieux, je me laissais guider par l’escalator, jetant un regard noir à une stupide amie qui se moquait encore de moi en bas. Arrivé en haut, je me dirigeais vers l’enseigne du café tout en sortant mon porte monnaie. Au loin, j’eu le sentiment de reconnaitre une voix. Je regardai du coin de l’œil, curieux de savoir si c’était une connaissance autre que les bruyants guignolots à l’étage du dessous. Ce n’était pas un ami, c’était la femme de ce matin. Toujours en panique, elle implorait  une femme d’avoir vu son enfant. Alors elle ne l’avait pas encore retrouvé ? J’eu un serrement au cœur. Pauvre petite, j’espère qu’elle va bien… Je secouais la tête. Ce n’était pas de ma faute, pourquoi devrais-je me sentir coupable dans ce cas ? Arrivé dans le café, je pris les commandes et commençais à rebrousser chemin lorsqu’on me heurta. Je perdis un quart de seconde l’équilibre, assez pour me renverser un capuccino sur mon manteau marron pale. Je râlais contre la tâche lorsqu’une poigne tremblante mais forte serra mon bras.

    « -Je vous ai vu ce matin dans la rue principale, vous nous avez observé ma fille et moi, n’est ce pas ? Avez-vous revu ma fille ? Vous avez certainement dû la croiser ! »

    Je fixais avec intervalle régulier le visage de la femme, rongé par le remord et la peur, ma tâche et les gens qui commençaient à nous regarder. Je mordillais ma lèvre inferieure. Et voilà, je m’étais encore mêlé de quelque chose qui ne me regardait pas et j’en payais les frais…

    « - écoutez, je ne l’ai pas revu… (J’étais effrayé de sa réaction quelque peu insistante.)

    - Certainement que si, vous êtes en ville depuis un moment! Vous l’avez vu, hein ?! Où est-elle, ma petite fille, ma chérie ! »

    Des murmures commençaient à se faire entendre à travers le magasin et j’entendais mes amis arriver devant le café, inquiets de ne pas me voir revenir.

    « - Puisque je vous dis que je ne l’ai pas revu…S’il vous plaît, j’ai des choses à faire …

    - Rendez-moi ma chérie ! Rendez-moi ma fille ! »

    Elle éclata en sanglot. Ses ongles me griffaient à travers mon manteau, elle ne lâchait pas mon bras. Les employés du lieu se précipitèrent vers la femme et la décrochèrent de mon bras. Tout en douceur, ils lui parlèrent, lui demandant ce qu’elle avait, puis un homme s’approcha de moi et s’excusa de l’attitude qu’avait eue cette femme face à un client (moi). Ainsi, ils m’offrirent une boisson gratuite pour ma prochaine venue et me laissèrent partir avec ma tâche et mon visage déconfit. A l’entrée, un ami me débarrassa de mes achats avant de les distribuer, puis une copine s’agrippa à mon bras. Tout en posant ces lèvres sur la tasse, elle me regarda du coin de l’œil et répliqua :

    « -Qu’est ce qu’elle voulait cette femme ? Elle est complètement chtarbée ! »

    Encore perturbé de ce qu’il venait de m’arriver, je répondis vaguement :

    « - Chtarbée… Ouais… »

     

     

    Et vous, réfléchissez, ne pensez-vous pas qu’il faudrait arrêter de jouer les aveugles ?


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  • [SOS - Indila]

    -« C’est ton copain ? »

    Je me retournais pour faire face à mon interlocuteur, un sourire triste au visage. Je ne voyais pas sa tête, mais pourtant cette personne m’était familière ainsi que cette voix. L'endroit où j'étais était comme brumeux, je ne discernais pas toutes les formes avoisinantes, même mon esprit paraissait comme engourdit et mon cerveau vaporeux. J’étais assise il y a quelque seconde devant une télévision et dont la surface de l’écran formait comme une bulle de savon à regarder ce garçon que je connaissais obtenir une récompense à la plus grande remise des prix artistiques à Berlin : le plus jeune talent et le plus prometteur. Il était plus vieux, il avait enfin fini le lycée, il avait eu l’opportunité de réussir depuis un an, mais pas moi. J’étais encore bloquée dans ce lycée, je traînais le pas dans mes études alors que j’avais un don moi aussi, je n’étais pas parvenue  à obtenir le garçon qui me faisait tourner la tête et voilà qu’il passait à la télévision avec la Renarde en guise de petite-amie. Cette fille ne m’avait jamais inspiré confiance, depuis ma rencontre avec elle, je savais qu’elle me mettrait des bâtons dans les roues, ses yeux félins,  sa chevelure rousse et sa silhouette svelte me le disaient. Et maintenant, les voir s’enlacer dans cette émission ne faisait que me rappeler ma défaite face à cette fille et la tristesse que j’avais enduré. Je savais pourtant que si je voulais, je n’avais qu’à passer à travers cette télévision grâce à la nouvelle application pour les rejoindre et mettre le chaos comme je savais si bien le faire, mais j’étais las, las de toujours courir après ce que je ne pouvais obtenir qu’en attendant. Alors je m’étais résignée à attendre, comme la vie me l’obligeait, je restais enchaînée à cette chose nommée le temps. Je restais à cette fête qui avait réuni toute la famille chez moi, un verre de champagne à la main, en tenue légère mais festive, devant ma télévision, l'esprit embrumé.

    Je répondais inconsciemment à la personne qui m’interpellait tantôt, cette personne et cette voix qui entraînaient une sorte de mélancolie en moi.

    -« Non, Mamie, juste une personne que je connais, juste… »

    Je me réinstallais face à l’écran, un pincement au cœur. C’était à lui de monter sur le podium. Un air grave au visage, il hésitait à monter les marches, comme s’il oubliait quelque chose. Il grimpait lentement, frustrant le public lorsque sa copine lui rappela sa présence en s’agrippant à son bras pour monter avec lui sous le feu des projecteurs.

    -« Ahah, évidemment, mon garçon, tu as oublié ta dulcinée, me moquais-je en ramenant mon verre à ma bouche et en avalant d’une traite le champagne, blessée. »

     Il la regarda un instant et la repoussa en secouant la tête. A cet instant, la voix du présentateur s’emballa :

    -« Mesdames et Messieurs, nous venons d’assister à la fin d’un couple ! »

    Interdite, je fixais avec plus d’attention l’écran après avoir monté le son, attirant l’attention contre mon gré des personnes autour qui se joignit à moi. Nous n’avions qu’une retransmission de vagues chahuts et une caméra qui venait d’être lâchée, voletait maladroitement autour d’eux et renvoyait les images de la dispute.  La Renarde ne comprenait pas, elle s’impatientait, elle perdait le contrôle.  Seul le mot « fini » fut clair et distinct dans les hauts parleurs de ma télévision, le seul qui déclencha un misérable plaisir en moi.

    La jeune fille voyait désormais qu’elle n’était plus qu’une intruse, les larmes aux yeux, elle s’enfuit de la salle, laissant derrière elle un silence pesant. Pour compenser cette aphasie soudaine, le présentateur réanima la soirée :

    -« Eh bien, nous voilà bien, le premier festival de Berlin que vous faites, vous réussissez à le rendre divertissant ! J’ai hâte de voir ce que vous nous proposerez l’année prochaine ! »

    Il sourit, gêné avant de se rapprocher de l’animateur pour se saisir son micro après son consentement. La caméra effectua un zoom sur son visage, son visage qu’il tourna droit vers l’objectif et fixait avec un air sérieux. 

    -« Alice, tu m’entends ? »

    Je me pétrifiai en entendant mon prénom. Inconsciemment, je me retournais pour voir s’il ne parlait pas à quelqu’un d’autre, mais l’expression ébahis des personnes derrière moi disaient tout le contraire. Malheureusement, ils n’étaient pas ébahis par cette nomination, mais plutôt par l’ombre de la Renarde, plantée derrière moi, noire et oscillante, la silhouette d’un couteau à la main. Elle ne bougea pas cependant et avant même d’avoir eu le temps de réagir, une douleur foudroyante m’assaillait, comme si j’avais manqué un morceau de la scène et avais directement avancé vers celle qui m’intéressait. Je lâchais mon verre, se brisant dans un fracas retentissant et posais un genou à terre, souffrante. Je crachais le peu de champagne que j’avais avalé, celui-ci mélangé à un liquide rougeâtre et visqueux : du sang, Mon sang. Je regardais mon ventre, l’objet de ma douleur, et vis une plaie semblable à un couteau, ruisselante, l’arme du crime ombreuse toujours à l’intérieur disparaître tel un nuage de fumée. L’image floue de ma meurtrière ne s’était pourtant pas déplacée, elle était toujours là, sans expression, assistant au spectacle que je lui offrais. La seule différence était que l’ombre de son couteau laissait couler des gouttes s’évaporant comme de la vapeur avant de toucher le sol. Mes mains étaient recouvertes de ce rouge brûlant, la brume dans mon esprit se dissipait et mon regard se tourna vers les ombres qui se rassemblaient autour de moi en oscillant après avoir contourné la silhouette toujours immobile de la Renarde. Je savais maintenant qui elles étaient : les défunts de ma famille. Ils étaient venus pour moi. Je me débattais alors qu’ils me faisaient disparaître lentement comme de la fumée. Je lançais des grands coups de bras dans ces ombres qui passaient au travers inutilement. Je me transformais en fumée, moi aussi je commençais à devenir un souvenir.

    Derrière l’écran, le jeune garçon avait tout vu. Il s’était tourné vers la et fixait intensément l’objectif d’un regard empli de terreur avant de tendre la main à travers l’écran en criant des mots inintelligibles. D’un geste faible, je la saisie et passais de l’autre côté. Alors que j’aurais dû apparaître dans une salle bondée de monde, que des hurlements d’effroi aurait dû se faire entendre des invités de la remise des prix en me voyant tomber dans les bras du gagnant, gravement blessée, j’atterris dans une salle blanche sentant le désinfectant et le médicament où un « bip » sonore résonnait. Tel un fantôme, j’avais vue depuis le plafond sur mon corps inerte relié à une machine lui permettant de vivre. Ce corps qui m’appartenait mais que je ne pouvais contrôler en ce moment même avait vieillit de quelques années, ses cheveux étaient plus longs. Aux côtés de mon corps, un homme blond, d’une vingtaine d’année, une barbe de deux jours, il lui parlait. Il n’attendait pas de réponse, mais cela lui suffisait à en voir son sourire. Il lui tenait la main et avait à la fois un air doux et triste.

    Des larmes coulèrent le long de mes joues. Je me souvenais. J’avais déjà ressenti cette douleur tantôt. Oui, ça m’étais déjà arrivée il y a quelques années déjà. Tout c’était déroulé de la même manière. La Renarde n’avait pas supporté que je puisse être une potentielle rivale de cœur, que je perturbais Alec, ce garçon dont nous étions amoureuses. Elle ne pouvait imaginer une situation dont elle ne pouvait avoir le contrôle. Alors elle avait choisit la méthode la plus radicale et la plus insensée : réduire toute nuisance à l’état de poussière. Et cette nuisance, c’était moi.  Finalement, elle m’avait poignardé de la même manière, bien que le contexte fût différent. Et aujourd’hui, j’étais à l’hôpital, dans le coma depuis déjà 2 ans. De gros sanglots me firent trembler et pleurer. Alec ne m’avait jamais quitté, il était à mon chevet, vieilli, certe, mais toujours là. Je ne l’avais jamais vraiment quitté non plus, j’étais juste prisonnière de mes songes depuis 2 ans, prisonnière du temps qui s’était arrêté pour moi.  Je volais vers Alec en souriant, les larmes aux yeux. D’un geste tendre, je lui caressais la tête et d’un léger murmure, je lui dis à l’oreille que j’étais prête à revenir. Je me sentis glisser dans les bras de Morphée et m’endormit.

    Quelques heures plus tard, une jeune fille se réveillait, affolant positivement les docteurs qui courraient vers la chambre, et ébahissant un jeune homme qui se jeta dans ses bras. Cette fille, d’un sourire fiévreux, lui tapota l’épaule. Elle ressentait de nouveau cette douce envie de vivre et cette emprise sur son destin qu’elle avait enfin.


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  • Bon dieu de merde, comment on avait réussi à se foutre dans une telle situation ? On a des cannibales au cul, le feu qui se répand dans la forêt, dévorant la végétation tout autour de nous, et cette grognasse de Mary-Sue dans les bras du prépubère qui s’excite toute seule !!

    La troupe de bras cassés fonçait à toute vitesse sur le sentier sans un regard en arrière. Tamalice à l’avant, aidée de sa vitesse elfique, suivie de Pitch, avec ses grandes jambes, Mayumi, s’efforçant de courir à toute allure, deux petites créatures de sables s’accrochant tant bien que mal à ses cheveux, tandis que Jack, à l’arrière, était ralenti par le poids de Mary-Sue, qui n’avait pas compris la gravité de la situation et caressait le torse du jeune homme de ses mains parfaites.

    La meneuse entendit un fracas épouvantable venant de devant eux, comme un monstre qui chargeait, avant de percuter de plein fouet quelque chose. Elle tomba violemment sur le dos alors que tous freinaient des quatre fers et que la chose en question échappa un miaulement apeuré.

    Tama se redressa à toute vitesse, pressée par l’urgence, dévisagea un instant la chose avant de la remettre sur pied. Elles tournèrent des talons ensemble alors qu’un animal colossal bardé de cornes émergeait des broussailles, poussa un brame féroce et piétina à fond de train en direction du groupe.

    Mayu et les Légendes n’eurent pas besoin d’un regard de connivence pour s’élancer à la suite des deux autres, la bête aux trousses. Les six revinrent sur leurs pas, bifurquèrent dans un chemin en voyant les aborigènes arriver en face, tentant d’échapper aux flammes, et continuèrent à sprinter entre les branchages et les fougères embrasés. Ceux de tête entendirent May hurler hystériquement : « Chaud ! Chaud ! » lorsque le feu gagna ses chaussures, alors qu’elle secouait le pied et déséquilibrait Jack pour tenter de l’éteindre. Malgré leur situation, Tamalice ricana intérieurement et ne prêta aucune attention au précipice qui s’ouvrait béant à ses pieds. Elle posa le pied dans le vide et tomba comme une pierre. Mayu s’arrêta nette, horrifiée, et hurla le nom de son amie, son cri recouvert par le bruit d’une cascade gigantesque qui chutait à grands fracas sur sa droite. Alors que Pitch et la chose se stoppaient au bord de la falaise, Jack arrivait derrière, et, entrainé dans son élan par le poids de la Mary-Sue, ne put freiner à temps et heurta les autres, les entraînant tout les cinq dans une descente mortelle à la suite de l’elfe….

    ***

    Quenotte avait enfin réussi à se débarrasser de la graine que l’autre bringue lui avait enfoncée sur le bec. Allégée d’un pois et pouvant de nouveau pépier à son aise, elle s’éleva dans les airs, au-dessus de la canopée, et fixa un instant la forêt sous ses pieds qui avait pris feu. L’incendie se propageait dans toutes les directions, et elle entendit les hurlements des aborigènes qui cherchaient à y échapper. Elle secoua sa petite tête ronde puis scruta la végétation, à la recherche de son « maître » et de la troupe d’abrutis qui l’accompagnait. Elle les repéra, détalant en direction d’immenses chutes d’eau, et se mit à voleter à tire-d’aile vers eux.

    ***

    Tamalice hurla, s’arrêta un instant pour reprendre son souffle, puis hurla de nouveau, ce qui la fit boire la tasse lorsqu’elle plongea tête la première dans l’eau. Le courant violent l’entraîna à plusieurs dizaines de mètres de la cascade, puis les rapides se calmèrent et elle pu enfin émerger en hoquetant. Les autres suivirent le même chemin et ils se trouvèrent enfin tous réunis, Quenotte virevoltant joyeusement au-dessus d’eux.

    -Seigneur ! Les flammes ont carbonisé le cuir de ma botte, elle est foutue ! Je refuse d’apparaître en public si ma chaussure est abîmée !

    -Aah, je suis tombé dans l’eau sur les fesses, ça claque…

    -Je suis en train de me faire tuer par mes cheveux !

    -C’est vraiment un bon à rien ce Frost ! Sans lui on ne serait pas tombés !

    -Miaou ?

    L’elfe pataugea vers son amie pour l’aider à se dépêtrer de sa tignasse qui menaçait de l’étouffer (ce qui permit à celle-ci de remarquer la petite fée des dents et de la fourrer dans sa poche avant que Jack ne la remarque) puis s’adressa à May d’un ton railleur :

    -Heureusement qu’il y avait toute cette eau, c’était au moins ce qu’il fallait pour éteindre le feu que t’avais au cul !

    -Dommage que tu te sois pas noyée avec, manche à couilles ! Ca nous aurait débarrassés de la catastrophe naturelle que tu es !

    -Oh, Dame Mary-Sue perd sa superbe et s’adonne à un langage vulgaire ? Je doute que…

    -Silence !

    Pitch Black se dressait de toute sa hauteur, bien qu’un peu moins classe que d’habitude avec ses cheveux tripés et collés à son visage. Il poursuivit de sa voix suave habituelle :

    -L’important pour le moment serait de réussir à nous extirper d’ici, et de trouver des êtres civilisés capables de nous donner aider. Puis, se tournant vers Mayu et son amie, il ajouta :

    -Etant donné que ces deux jeunes filles, lors de notre rencontre, nous ont dit qu’elles vivaient sur cette île, je n’ai aucun doute quant à notre avenir.

    Il leur souri d’un air confiant, bien qu’il eut compris dès le début de leurs mésaventures que tout était du pipeau. Maintenant qu’il les avait mises dans une situation inconfortable, il voulait bien savoir par quelle pirouette elles allaient s’en sortir, en particulier Tamalice, qui avait l’idée du mensonge. On allait voir si elle était vraiment si futée…

    -Vivre sur cette île ? Oh les mythos ! Ces pouffes elles vivent dans une résidence universitaire pourrie avec même pas l’eau chaude !

    Bon, ben, pas de pirouette en fait.

    Tous se tournèrent vers la petite princesse, même la chose féline qui ne devait rien piger, et l’elfe menaçait de vomir mille insanités répugnantes envers sa pire ennemie, qui venait de foutre en l’air leur couverture. Jack éructa :

    -Quoi ?! Vous nous avez menti ?! Vous ne savez pas comment nous sortir de cet endroit ?

    Il regarda dans toutes les directions, abasourdi, avant de beugler :

    -On vous faisait confiance !

    Pas moi, espèce de petit merdeux. Si t’avais un tant soit peu été moins naïf, t’aurais remarqué que ces filles n’avaient dit ça que pour trouver un prétexte afin de rester avec nous.

    Mayumi se tortilla, gênée, tandis que la peste ricanait, heureuse de son effet. Elle changea d’attitude subitement, et, passant ses doigts délicats dans sa chevelure noire, déjà sèche et parfaitement uniforme et bien coiffée malgré la descente dans un torrent, elle s’approcha tout en volupté du jeune homme, collant sa poitrine magnifique à son torse et minauda de sa voix sublime :

    -Mais ne t’en fait pas, Jack, moi je suis là et tu peux me faire conf…

    Il la vira d’un revers de la main et elle tomba à la flotte en poussant un petit cri outragé. Les deux amies gloussèrent conjointement puis la blonde s’approcha de lui, une expression de regrets sincères dans le regard.

    -Ecoute, Jack, je… Je suis désolée. Je sais que sans nous, vous n’en seriez pas arrivés là, et que tous ce qui vous est arrivé est de notre faute. L’expression du jeune homme s’adoucit à ses paroles. Une inspiration vint soudainement à la tête de citrouille et elle tira la fée de sa poche, la tendant vers lui.

    -Même si tu ne me pardonnes pas, j’ose espérer que tu puisses moins me haïr en sachant que j’ai sauvé ton colibri des flammes !

    L’expression de Jack se transcenda : d’une moue dubitative, il paru fou de joie tandis que Quenotte volait vers lui après avoir tiré la langue à sa ravisseuse. Celle-ci reprit sa respiration un instant, puis lorgna de côté l’elfe et s’écria :

    -Et puis c’est elle ! Moi je n’ai rien fait ! Elle me tape si je ne la soutiens pas !

    Elle feint de s’évanouir pour parfaire sa comédie, mais ils avaient de l’eau jusqu’aux cuisses et elle émergea bien vite en crachotant. Tamalice fit un grand sourire malsain au Croquemitaine et asséna :

    -Je ne regrette rien.

    ***

     Ils avaient détaillé l’endroit où ils se trouvaient. C’était une sorte de vasque naturelle, aux falaises de pierre escarpées et hautes de six bons mètres. L’eau s’écoulait en douceur en un point du réservoir opposé à son lieu d’arrivé, leur montrant la sortie. Ils avaient tentés de sortir en escaladant les parois, mais la roche humide et l’eau alourdissant leurs vêtements, ils avaient du renoncer.

    Mayumi, curieuse de nature et tentée de se faire une nouvelle amie, avait fait connaissance avec l’être félin, et avait découvert qu’elle s’appelait Mélo et qu’elle parlait. Elle était constamment agitée et avait décidé de faire chier un peu tout le monde, ou du moins Mary-Sue, qu’elle suivait à la trace, la bouche en cœur, avant de lui cracher de l’eau à la figure (« -Non mais ça va pas?? –Nya nya nya… »). Ses cheveux bruns tombaient en bataille autour de son visage rond ; elle était vêtue d’un corsaire bleu et d’une tunique plus sombre, serrée à la taille d’une ceinture en tissu et portait de nombreux foulards superposés les uns aux autres, tintant à chaque mouvement à cause des sequins qui y étaient cousus.

    La blonde se rapprocha de Tama.

    -Il faudrait que l’on parte d’ici, au moins histoire de s’occuper. Je me vois mal rester indéfiniment, et les autres vont s’impatienter. Et on va finir par se transformer en corail, regarde j’ai des crabes qui essaient de me prendre pour un rocher ! Termina-t’elle en secouant frénétiquement la jambe hors de l’eau pour en virer les crustacés qui y avaient élu domicile.

    -Je pense aussi, mais on n’a plus d’autre chemin que la rivière qui s’en va, à l’opposé de là où on est arrivés, et on ne sait pas où ça mène.

    Mélo, qui avait décidé de stalker May et la suivait, immergée jusqu’au museau, avant de lui cracher dessus à intervalles réguliers, se retourna vers elles tandis que sa victime filait se planquer derrière les deux hommes.

    -Il y a une ville en aval du ruisseau, vous pourrez certainement y trouver ce que vous cherchez. Vous cherchez quoi au fait ?

    Les deux amies se concertèrent du regard avant de questionner la fille-chat : où, à combien de kilomètres, quelle ville, de quelle taille, comment sont ses habitants, peut-on y dormir (« -bah oui, vous trouverez bien un carton pour dormir, vous n’avez pas d’argent hein. »).

    -C’est une ville très importante, la plus influente de la région, vu que la famille royale y vit. Plein d’étrangers y viennent, alors les gens sont habitués, vous n’aurez pas l’air trop bizarres. On y pratique la magie couramment et c’est un centre d’étude, donc de nombreux savants y vivent. Elle est à quelques kilomètres d’ici, on peut s’y rendre en descendant la rivière. Elle est cernée de toutes parts de falaises, on ne peut pas en sortir pour l’instant, seulement quand on sera en ville.

    Jack et Pitch, qui s’étaient rapprochés, se dirent que c’était sûrement le meilleur moyen pour trouver quelqu’un qui saurait les aider à rentrer chez eux.

    -On devrait s’y rendre, c’est le seul moyen pour avancer dans notre situation, argumenta l’esprit du froid.

    -Sans oublier les érudits, qui doivent avoir dans leurs archives des traces de personnes de notre monde échouées ici. Il n’y a pas de raison pour que nous soyons un cas unique, plaida le Croquemitaine.

    -De toute manière, on peut pas rester là indéfiniment, mit en évidence Mayumi.

    -Tant qu’il y a à bouffer et du feu dans l’âtre, ça me va, lâcha Tamalice.

    -J’ai un peu d’argent sur moi, je pourrais vous payer une chambre d’hôtel, proposa Mélo.

    -Je suis sûrement la fille disparue du roi et de la reine de cette ville, voire la fiancée de leur fils unique. En tant qu’authentique bénéficiaire du pouvoir, figure d’autorité et emblème de la beauté et des papillons arc-en-ciel auprès du peuple, j’ai le devoir de sauver la contrée contre les forces obscures qui complotent en ce moment-même.

    Tous dévisagèrent Mary-Sue pendant un long, long moment. Elle leur rendit leur regard de ses yeux détenteurs de sagesse et de vérité. Ils la regardèrent. Elle les regarda. Ils la regardèrent. Elle les regarda. Ils la regardèrent. Elle les regarda. Ils la regardèrent. Elle les regarda. Puis ils décidèrent qu’ils en avaient marre et prirent la direction de la rivière menant à la cité.

     

     


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